L’hypothèque légale est un moyen qui permet de garantir les créances des artisans et entrepreneurs (ainsi que les sous-traitants) pour leurs prestations sur un immeuble.
Afin de pouvoir bénéficier de ce droit de gage, l’hypothèque légale doit faire l’objet d’une demande d’inscription au registre foncier.
1. Eléments de définition
L’art. 837 al.1 ch. 3 du Code civil définit la prestation fournie par l’artisan et entrepreneur comme « la construction ou la destruction de bâtiment ou d’autres ouvrages, au montage d’échafaudages, à la sécurisation d’une excavation ou à d’autres travaux semblables ».
L’artisan ou l’entrepreneur peut avoir fourni des matériaux et du travail ou du travail seulement.
2. Conditions d’inscription
- L’existence d’un contrat d’entreprise préalable. L’artisan doit posséder une créance contre le propriétaire de l’immeuble (dans le cas du sous-traitant, contre l’entrepreneur général).
- L’inscription peut être faite à partir du jour où les artisans/entrepreneurs se sont obligés à exécuter le travail ou les ouvrages promis et doit être obtenue au plus tard dans les quatre mois qui suivent l’achèvement des travaux. Les travaux sont considérés comme achevés lorsqu’ils sont exécutés selon le contrat. Ne sont pas inclus les prestations commandées dans un second temps, les retouches ni les travaux accessoires. Si le créancier du gage n’agit pas dans le délai, il perd son droit à l’inscription.
- L’absence de sûretés suffisantes fournies par le débiteur. En effet, si le débiteur fournit des sûretés suffisantes, il n’est pas possible de requérir l’inscription d’une hypothèque légale.
- Dans certains cas, la loi empêche l’immeuble d’être grevé d’une hypothèque légale. Tel est le cas par exemple lors que l’immeuble appartient au patrimoine administratif d’une commune, canton ou de la Confédération. L’art. 648 al.3 du Code Civil empêche également l’inscription, sauf accord de tous les intéressés, lorsque l’immeuble fait l’objet d’une copropriété et que les parts sont déjà grevées d’une charge foncière ou d’un droit de gage.
3. Eléments de l’inscription
Celui qui veut bénéficier d’une hypothèque légale doit le faire à l’encontre du propriétaire actuel de l’immeuble. Il s’agit donc de la personne inscrite au registre foncier en tant que propriétaire au moment de la demande d’inscription.
L’ordonnance sur le registre foncier (ORF), précise que la demande doit être accompagnée des documents établissant les créances en garantie desquelles l’hypothèque légale doit être inscrite.
Concernant l’hypothèque légale des artisans et entrepreneurs, il faut prouver également que le propriétaire a reconnu le montant de la créance garantie par le gage ou qu’il a autorisé l’inscription. A défaut, il peut également prouver qu’un tribunal a fixé le montant du gage dans le cadre d’une procédure au fond.
Cette condition peut parfois poser problème au vu du délai très court de 4 mois pour obtenir l’inscription de l’hypothèque légale. Pour pallier cette difficulté, le créancier a la possibilité d’obtenir une inscription dite provisoire lorsqu’il y a un désaccord entre les parties sur l’existence du gage ou sur le montant de ce dernier.
L’inscription provisoire a le caractère d’une annotation au registre foncier qui crée une restriction du droit d’aliéner l’immeuble. Cependant, elle ne permet pas au créancier de requérir la poursuite en réalisation de gage. En effet, il faut valider l’inscription provisoire par une inscription définitive.
Pour cela, le créancier du gage doit encore faire valider sa créance dans le cadre d’une action au fond en inscription définitive de l’hypothèque légale.
Le jugement ordonnant l’inscription définitive se distingue d’une action en paiement du prix. En effet, dans le premier cas, le juge fixe uniquement le montant garanti par l’hypothèque légale mais n’établit pas la créance elle-même. Ceci implique qu’il ne sera pas possible de requérir la mainlevée définitive pour le gage s’il n’y a pas eu d’action en paiement.
4. Les effets de l’hypothèque légale
- La créance devient imprescriptible
- En cas de non-paiement, le créancier peut requérir la vente de l’immeuble afin de se faire désintéresser sur le produit de la réalisation de ce dernier. La procédure de poursuite en réalisation de gage est applicable.
- Lors de la réalisation d’immeubles, tous les bénéficiaires d’hypothèque légale des artisans et entrepreneurs concourent à droit égal, indépendamment de la date d’inscription de leur hypothèque.
5. Conclusion
L’inscription d’une hypothèque légale requiert le respect de nombreuses conditions. Le délai pour la requérir est court, raison pour laquelle il est toujours judicieux de faire une demande d’inscription provisoire avant de la faire valider au fond pour qu’elle devienne définitive.
Il peut donc être utile de se faire représenter pour mener à bien cette procédure.
Ophélie CURRO, juriste
Creditreform Romandie GNT SA